Quelle place l’agriculture occupe-t-elle dans la tradition africaine ?

Assurément, une place très importante car elle est étroitement liée aux cultes.

En quoi les nouveau-nés sont-ils concernés par cette tradition ancestrale ? Pourquoi ont-ils besoin d’un rituel d’initiation ?

Prenons l’exemple des cultes endogènes qui sont pratiqués depuis des siècles dans la région « AKHÖ » (Adja-Tado, Ké, Hun et Öyö). Cette aire géographique recouvre une partie de quatre Etats issus de la colonisation de l’Afrique de l’Ouest à savoir le Nigéria, le Bénin, le Togo et une infime partie du Ghana. Elle est le berceau cosmopolite des premières traditions ancestrales qui visaient à assurer la longévité des humains et de la nature environnante.

Parmi ces cultes fondamentaux figurent : la tradition d’inscription de tout nouveau-né au cercle de sa famille d’accueil et les rites d’initiation qui ont pour objectif de placer l’enfant sous les meilleurs auspices pour ses futures performances professionnelles dans le domaine de l’agriculture, toujours selon les croyances ancestrales encore en vigueur dans l’aire cultuelle et culturelle « AKHÖ ».

Famille - Abdomen

En tant que membres du conseil familial d’une collectivité ou d’un clan, ce sont les reines mères et les patriarches de la branche paternelle de l’enfant, qui sont les garants et les dépositaires de ce rituel d’initiation. Ils le perpétuent en vue de faciliter l’existence du nourrisson dans son nouveau monde, c’est-à-dire sa vie sur Terre. Considérant que tout nouveau-né est un descendant d’un ou de plusieurs ancêtres fondateurs de sa famille d’accueil, les traditions primitives prescrivent des soins obligatoires à lui administrer par les membres les plus âgés de sa famille paternelle.

TRADITION FAMILLE ENFANT INITIATION Agriculture DAHOMEY

Déroulement du rituel d’initiation

A compter du jour de l’accouchement, toute mère d’un bébé est soumise à l’obéissance de principes élémentaires qui régissent le rapport entre les ancêtres de sa belle-famille et son enfant. La raison est d’ordre sanitaire, par crainte de possibles conséquences des maladies qui pourraient survenir au cours de la vie de l’enfant en cas de transgression. La durée réglementaire pour l’ensemble de ces rites varie en fonction du sexe de l’enfant : sept jours pour les filles et neuf jours pour les garçons. Il s’agit d’une période au cours de laquelle la nouvelle mère ne doit manger aucun aliment salé ou pimenté par exemple. De même, elle n’a pas le droit de sortir de la maison pour être vue à l’extérieur par des personnes étrangères, notamment par des gens avec lesquels elle aurait eu un conflit non résolu au cours de sa grossesse jusqu’au jour de son accouchement. Ce sont là quelques mesures à respecter pour éviter tout préjudice sur la vie de l’enfant.

Communauté - des loisirs

Sur la liste des précautions à prendre, il est défendu à une nouvelle mère d’observer le ciel au cours des soirées et cela tout au long de séjours dans la maison pendant phase d’isolement parce qu’elle pourrait croiser la sortie d’une nouvelle lune, laquelle peut être source de malédiction pour son bébé. A propos de cet interdit, plusieurs traditions de l’aire cultuelle Adja-Tado, Ké, Hun et Öyö s’accordent sur le fait que certaines nouvelles lunes sont porteuses de malédictions tant pour les femmes en couche que pour celles en état de menstruation. La tradition préconise ces mesures à cause de l’affaiblissement des pouvoirs protecteurs de la mère sur son enfant en cas d’attaque d’une force maléfique.

des loisirs - Loisirs

La fin de cette période d’isolement maternel est marquée par des coutumes qui sont célébrées dans l’intimité ancestrale par les reines-mères et les patriarches qui consistent à offrir les premiers mets à l’enfant. C’est à cette occasion que se célèbre le culte d’initiation du nouveau-né à l’agriculture, à travers rites et offrandes adressées aux divinités agronomes à savoir : Sakpata, Xêfiosso et autres. A la fin, la nouvelle mère sous l’inspection des membres du conseil familial doit labourer le champ et semer des graines de maïs et de haricot avant de retourner à la maison avec des fagots de bois et des racines de plantes ainsi que des feuilles à préparer en guise de tisane pour son bien-être et celui de son nouveau-né.

Graminées - Agriculture

Ensemble, les rites d’inscription d’un nouveau-né dans le cercle de la famille se veulent être un système de prévention endogène contre des blocages et d’autres difficultés liées aux maladies héréditaires, là où les cultes d’initiation des nouveau-nés à l’agriculture sont nécessaires pour faciliter l’alliance entre les divinités de production agricole et tout nouveau-né au profit d’un rendement croissant tout au long de la vie agronomique de ce dernier.

Plante - L'eau

Sol - Plante

L’exemple de la région AKHÖ nous aide à comprendre que ce sont ces dispositions basées sur la foi des adeptes qui sont à l’origine des remarquables capacités agronomiques chez les natifs d’Afrique. L’agriculture constitutive du culte endogène est un mécanisme sociétal que partagent encore des milliers d’habitants de cette grande région cosmopolite. Ils font société autour de ces principes, comme le faisaient leurs ancêtres avant eux. Par ailleurs, ces capacités à labourer, à défricher et à cultiver sous un climat chaud n’est-il pas aussi l’une des motivations esclavagistes portées sur la qualité des captifs en provenance du Dahomey sur la « côte des esclaves » ?

De même, ces règles vitales, reconnues par le plus grand nombre et inculquées depuis la plus tendre enfance, ont guidé les Africains déportés dans différentes régions des Antilles et des Amériques. Ces principes ont jeté les bases de nouvelles sociétés tournées vers l’agriculture.

Remerciements aux contributeurs : Yinjla FASSINOU, Mathieu DJIVOESSOUN, Agbannon DOSSA, et tous nos amis des grandes et des petites Antilles partenaires de longue date

Reptiles - Serpents rois

Cheveux longs / M - Arbre
rituel nouveau né 12