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Un nouveau roi dans l’histoire du royaume de Ké

Royaume de Ké - 30.8.2014
Le roi Ké-Holou Agagnon III

 

Ké-Holou Agagnon III le 30 août 2014
Cérémonie d’intronisation au royaume de Ké

Le roi Ké-Holou Agagnon III ajoute son nom à l’histoire du royaume de Ké

Au Bénin, dans la vallée de l’Ouémé, le trône du royaume de Ké n’est plus vacant depuis le 30 août 2014.

Ké est l’un des plus célèbres royaumes du Dahomey. D’après les récits historiques des sages Kplökplö Dandjinou, feu Oké Gou Laminou et feu Agbadjoumon Fadëgnon, ce royaume a été fondé par le prince Ojulani qui endossa alors le nom de Ké-Holou Agagnon. Le prince Ojulani était chef de culte et redoutable guerrier. Pourchassé par les Adja, il avait du quitter sa région natale d’Ile-Ifé, et s’exiler à Kétou puis à Késonu (Kessounou), dans un fond comprenant les fontaines Sotonou, Aïdégbè et le bassin du fleuve Wogbo. Finalement, à la demande de son frère Kinkpa, Ojulani rejoignit la plateau de Ké tout proche et devint le roi Ké-Holou Agagnon qui signifie “Ké est mieux par rapport à Késonu”

Le règne de Ké-Holou Agagnon a ensuite connu plusieurs années de luttes contre les nomades Yoruba et Fons. Pour la sécurité de son royaume, il finit par autoriser l’occupation des terres situées à l’est de son royaume par un guerrier transhumant répondant au nom d’Ago-Gnihwouan. Après le déclin du royaume de Ké, ce dernier s’auto-proclama roi.

Au fil des ans, le royaume de Dangbo devint indépendant. Un peu avant 1783, un successeur du nouveau royaume mena des guerres sourdes vis-à-vis des descendants de Ké-Holou Agagnon et parvint à étendre sa domination sur cette dynastie. Le trône restera vacant jusqu’à ce 30 août 2014 où la succession de Ké-Holou Agagnon est devenue effective.

Pour cette grande occasion, plusieurs rois sont venus de différentes régions du Bénin et du Nigéria. De nombreux notables et dignitaires des sept dynasties de Wémè étaient également présents à cette manifestation.

La nécessité de sauvegarder la tradition

Cette intronisation est aussi l’occasion de parler de l’une des facettes importantes des récits historiques que nous avons recueillis auprès des sages. Il s’agit de la déportation du premier fondateur du royaume de Ké par les Anglais. Or, la coutume de Ké honore chaque année la mémoire des déportés par des offrandes.

Cette déportation marquante a-t-elle renforcé cette tradition qui veut garder fidèlement la mémoire de ses déportés ? D’une façon plus générale, quel poids les 4 siècles d’esclavage ont-ils eu sur le renforcement des techniques mémorielles de la tradition orale ? Car au Bénin, cette oralité est capable, encore aujourd’hui, de faire resurgir des noms d’esclaves et de nombreux détails relatifs à la traite des Africains.

En d’autres termes, la perpétuation de ce folklore, patiemment mis au point au fil des siècles par les aïeux, revient à conserver les valeurs, les repères, le fil historique et identitaire de chaque famille, le chemin vers les fiers ancêtres de chaque collectivité, quelle soit Fon, Adja, Ewé, Gen, Mina ou Yoruba puisque le Bénin se trouve être un carrefour ethnique et culturel.

Retranscrire l’oralité, afin de sauvegarder le contenu historico-culturel de la tradition, est une des priorités de notre ONG.

 

La tradition prévoit la protection ésotérique du roi contre le mauvais sort et l'occultisme
Gardes et conseillers ésotériques assurant la sécurité du roi

 

 

 

 

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Le chemin de peine des esclaves de Dangbo

Voici l’histoire de cet endroit insolite surnommé par les habitants “la rue de peine”. Nous l’avons apprise des sources traditionnelles que sont les contes, les chansons, les adages, ainsi que les lignes panégyriques datant des règnes de deux rois dont nous parlerons plus bas.

Cette “rue des peines” ou “chemin de peine des esclaves” n’est pas une formation naturelle. Ce passage été creusé en 1819 par l’homme à travers la roche. Auparavant, et depuis une époque reculée, les populations locales allaient s’approvisionner en eau potable au Nord-Ouest de Dangbo à plus d’un kilomètre du royaume de Ké et à moins 200 mètres du palais de Houéton, roi de Wémè. La fontaine surnommée Yëmiyë (aujourd’hui Sotö) était la véritable source qui satisfaisait les besoins en eau des royautés présentes sur le territoire de Ké.

Quant aux femmes de Dangbo, la cité du roi Ago-Mêdjê (1794-1835), elles avaient un seul itinéraire pour y accéder. Il s’agissait de la route qui partait de Djëkpa, un ancien centre d’échange de vivres, et qui passait devant la maison d’un certain Dobi, autrefois un grand sorcier, raconte l’histoire. Ce chemin est bordé à 30 mètres de-là par la grande forêt de la divinité Kpovi, laquelle est parsemée d’Iroko et habitée par des animaux sauvages qui apeuraient habituellement les usagers. A partir de cette forêt, une dense prairie s’empare des rebords de la voie qui débouche sur le palais du roi Houéton (1813-1828). Ensuite, tout le reste de la trajectoire suit une dépression géomorphologique assez forte et parsemée de débris de canaris (jarres) par endroits, et débouche finalement sur un bassin d’eau peu profond. (voir vidéo ci-dessous)

Voici le début des conflits ayant entraîné le roi Ago-Mêdjê à exploiter les esclaves pour la construction de cette rue escalier.

Il était une fois, dit l’histoire, une dame de la royauté d’Ago-Mêdjê revenant du marigot Yëmiyë posa le pied malencontreusement dans l’excrément d’un porc. Pour s’en débarrasser, elle se déchargea tout doucement de la jarre qu’elle avait sur la tête, prit un peu de son contenu et partit se laver le pied contre le mur du palais royal de Houéton qui était tout proche. Sans savoir que les gardes du roi Houéton la voyaient, elle dit à voix haute : “On dirait que les Wémènou, maîtres de ce palais, se nourrissent d’excréments porcins”. Le roi étant à la maison, les gardes partirent lui rapporter ce que venait de dire cette femme. Irrité, le roi Houéton ordonna qu’on lui ramena cette dame. Elle était géante comme les siens, tous au-dessus de la taille moyenne. Après s’être présentée au roi Houéton comme princesse venant du palais d’Ago-Mêdjê, elle n’a rien nié des faits pour lesquels l’autorité l’a interpellée. “va dire à ton père Ago-Mêdjê, lui répliqua le roi Houéton, que les habitants de mon palais se nourrissent des excréments porcins, mais les siens, des excréments bovins”. Avant, de la laisser, le roi Houéton, n’a pas omis de recommander à ses gardes de lui infliger quelques châtiments corporels. Une fois rentrée, cette princesse dont le nom n’a pas été retenu par la tradition, reporta les faits au roi Ago-Mêdjê. D’après le récit, elle avait été violentée et avait encore les meurtrissures de chicotes partout sur le corps.

Comme le décrivent les sources orales parvenues à notre époque, Ago-Mêdjê était un homme apparemment très grand, noir et si robuste que les siens le surnommaient Sogbovodoun c’est-à-dire sosie d’un dieu Oritcha. Mais malgré sa stature et les gages d’une armée très bien au point, Ago-Mêdjê ne put rien attenter contre Houéton protégé d’une part par les Anglais et de l’autre, par ses propres guerriers. A défaut de puiser l’eau de la Yëmiyë, les citoyens de Dangbo étaient alors obligés d’aller se servir au canal Blom ou à la rivière de Gnondötökpa appelée Mondötökpa de nos jours. C’est le point de départ des conflits entre Houéton et Ago-Mêdjê, le premier, onzième roi, dernier de dix générations de descendants des sept dynasties de Wémè, et le second, sixième au-dessus de la royauté d’Ago-Gnihwouan postérieure au royaume de Ké. Le canal Blom n’est distant que de 1,6 km de Dangbo. Mais alors que le Blom s’assèche chaque année, la fontaine Yëmiyë, elle, est intarissable.

Bassin du Sotö
Large et peu profond, le bassin est pratique pour ses utilisateurs

Les rois emprisonnaient les captifs de guerre qu’ils marchandaient aux Européens contre des armes. A Dangbo, le roi Ago-Mêdjê en était un des acteurs. Mais en attendant l’arrivée des Européens sur la lagune de Porto-Novo où ce commerce prospérait, le roi Ago-Mêdjê de Dangbo, condamnait ses captifs aux travaux forcés. La rivière Sotö et son palais étant séparés par deux kilomètres de reliefs rocheux, il a utilisé ses prisonniers pour aménager un chemin et creuser un passage long de plus de 150 mètres jusqu’au point d’approvisionnement. Une fois le percement réalisé, il n’avait plus qu’à obliger les futurs esclaves à franchir les marches glissantes de cette rue escarpée pour aller lui chercher de l’eau.

Un point d'eau stratégique
Une femme utilise l’eau du Sotö (anciennement la Yëmiyë)

 

 

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